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CGV TV 2026 : ce qu'en pensent les médias traders

Le Cercle Programmatique est une initiative indépendante lancée en 2025, qui réunit chaque mois, les responsables trading et experts du programmatique des principales agences média françaises. 

Notre mission : créer un espace de débat libre et constructif sur les enjeux majeurs du secteur, loin des discours marketing et des effets d'annonce. 

Notre méthode : des sessions de travail collaboratives entre praticiens expérimentés, suivies de la publication d'articles collectifs reflétant nos positions communes. 

Notre ambition : redonner une voix crédible et indépendante aux experts terrain du programmatique français, au service d'une industrie plus mature et transparente.

Les régies TV françaises ont frappé fort avec leurs CGV 2026. TF1 Ad Manager, My6, ADspace·ia... Ces nouvelles plateformes promettent de révolutionner l'achat TV. Mais que pensent vraiment les professionnels du trading programmatique de cette transformation ? Le Cercle Programmatique a interrogé 4 experts de l’achat programmatique pour décrypter cette évolution majeure.

Du déjà-vu ou vraie innovation ?

Premier constat unanime : ces plateformes ne révolutionnent pas fondamentalement l'approche technologique. Les experts y voient un retour aux tentatives des régies display d'il y a quelques années pour contourner les frais DSP/SSP. Coté Gamned, on qualifie même ces outils de "déjà-new", très proches des DSP existantes.

Pourtant, tous reconnaissent certains atouts distinctifs. L'accès à l'intégralité des inventaires invendus, la possibilité d'acheter simultanément du linéaire et du streaming, ou encore l'exploitation de données propriétaires représentent de véritables opportunités. L'innovation réside surtout dans la démocratisation de l'achat TV, particulièrement pour les PME qui accèdent désormais à des données déterministes et contextuelles.

La bataille des échelles

Peuvent-elles pour autant rivaliser avec les géants Google DV360, Trade Desk ou Amazon DSP ? La réponse est nuancée. Sur la vidéo et la CTV, elles disposent de volumes d'inventaire suffisants, mais leur faiblesse internationale constitue un handicap majeur dans un monde globalisé.

Ces plateformes confirment que les diffuseurs se rapprochent plus des walled gardens que de l'open web, en atteste par exemple la difficulté pour obtenir les programmes sur lesquels sont diffusés les campagnes. Leur principal défaut reste le périmètre exclusif à chaque broadcaster, qui fragmente l'écosystème. Pour rivaliser avec les GAFAM, elles devraient s'unifier et s'ouvrir à des inventaires externes.

Impact opérationnel : entre opportunités et complexité

L'intégration de ces plateformes dans les workflows existants fait consensus : elles viendront en complément, non en remplacement des DSP actuelles. Le principal avantage réside dans le gain d'autonomie, permettant d'extraire les deals sans contacter directement les broadcasters.

Mais cette multiplication des interfaces inquiète. La complexification supplémentaire, l'allongement des délais de mise en ligne et la courbe d'apprentissage pour les équipes programmatiques représentent des défis majeurs. Les traders habitués aux DSP devront assimiler de nouveaux codes : passer de la notion de CPM au GRP, de l'optimisation temps réel aux résultats différés.

La mesure, éternel défi

L'intégration des données semble techniquement viable grâce aux possibilités d'export, mais la vraie question porte sur l'harmonisation des KPIs. Les nouveaux indicateurs comme l'attention ou le co-viewing suscitent un intérêt mesuré. Ils ne doivent pas remplacer les indicateurs standards mais les compléter, en fonction des objectifs spécifiques.

Le défi majeur reste l'unification. Plus les silos se multiplient, plus il devient difficile d'unifier les résultats, notamment sur le reach et la fréquence cross-plateforme. La consolidation via des outils BI permet d'envisager une granularité accrue, mais au prix d'une complexité opérationnelle.

Impact business limité à court terme

Contrairement aux attentes, ces évolutions ne devraient pas provoquer de réallocation massive des budgets. Aucun transfert brutal du digital vers la TV n'est anticipé par les experts interrogés. L'approche privilégiée reste le "global vidéo" plutôt qu'un basculement entre canaux.

L'impact se concentrerait sur la "long tail" et les PME, pour qui l'accès à la TV devient plus accessible. Pour les gros annonceurs, les changements resteront marginaux à court terme. Sur les négociations, l'impact demeure incertain mais pourrait rebattre les cartes à long terme, avec une compétition basée sur la maîtrise de l'achat plutôt que sur les volumes.

Vision d'avenir : DSP inside

Interrogés sur leurs priorités d'ici deux ans, les experts penchent massivement pour les DSP, idéalement enrichies d'inventaire télé. Cette vision privilégie l'omnicanalité et l'unification des leviers CTV.

Face aux GAFAM, les régies TV françaises peuvent s'imposer localement mais peinent à rivaliser globalement. Pour réussir, elles devraient se concentrer sur leur cœur de métier : recommandation média, accompagnement commercial et création de contenu premium, tout en évitant une industrialisation sans la capacité d'échelle internationale.

L'attente unanime reste la mesure unifiée de la vidéo avec un KPI unique entre digital et TV linéaire.

Les conclusions de ces professionnels du trading convergent sur les défis à relever. Chez Gamned, l'enjeu principal est le suivant : Rendre accessible l’inventaire TV au sein des DSP.

Quant aux équipes de Jellyfish, elles attendent "l'annonce d'une monnaie commune, issue de la fusion des indicateurs GRP TV et CPM digitaux."

Les CGV TV 2026 marquent indéniablement une étape, mais la révolution annoncée reste à démontrer sur le terrain. Entre promesses technologiques et réalités opérationnelles, les media traders restent pragmatiques face à cette plateformisation de la télévision.