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L’IA de Meta ne remplacera pas les agences médias. Et c’est une bonne nouvelle pour les annonceurs.

Un article publié dans The Media Leader évoque la vision partagée par Mark Zuckerberg dans le podcast Stratechery : une IA capable de gérer toute seule une campagne média. Objectif affiché par le fondateur de Meta ? Rendre les agences obsolètes.

Je vais être clair : ce fantasme technologique est non seulement irréaliste, mais aussi dangereux pour les marques. Voici pourquoi.

1. Une automatisation totale ? Illusoire

Si des grandes plateformes, comme Google et Meta, mettent depuis quelques années de l’IA à tous les étages, en témoigne le lancement de Performance Max et Advantage+, il est aujourd’hui techniquement impossible de bâtir une IA capable d’activer l’ensemble des leviers média.

Pourquoi ? Parce qu’un grand nombre d’entre eux ne sont tout simplement pas automatisés, comme c’est le cas de l’affichage, de la radio, de la presse locale, des partenariats et de l’événementiel. Et que c’est aussi le cas de certains formats digitaux, complexes par nature.

L’IA de Meta ne pourra jamais briefer un directeur de création ou acheter une opération spéciale dans un média premium. Pour tout cela, il faudra de l’humain. Une ressource qui se fait rare chez les annonceurs, même chez ceux qui ont internalisé l’achat média, et qui font d’ailleurs parfois machine arrière sur le sujet. Notamment après s’être rendu compte de la difficulté à recruter, fidéliser et garder au niveau les talents nécessaires.

2. Meta juge et partie ? Non merci

Même si Meta parvenait à automatiser toute la chaîne d’activation, cela poserait un énorme problème d’objectivité. Qui va décider de la bonne répartition budgétaire entre Meta, Google, Amazon, la TV, le DOOH ou le sponsoring d’un événement sportif ?

Meta ? Sérieusement ? Alors que le récent procès de Google aux Etats-Unis est venu rappeler les problèmes que peut engendrer la présence d’un acteur des deux côtés de la barrière, il est inimaginable de voir les marques faire la même erreur avec Meta.

Une marque a besoin d’un tiers de confiance indépendant, capable de piloter une stratégie globale, de challenger les plateformes, de croiser les KPI et de faire arbitrer en fonction de la performance réelle. Les agences sont là pour ça.

3. Meta n’est pas éternel

Facebook était le réseau social dominant. Les jeunes ont déserté. Meta a réussi à revenir dans la partie avec Instagram, avant de copier TikTok avec Reels, sans parvenir à reconquérir les audiences les plus volatiles.

Miser uniquement sur Meta, c’est comme avoir tout investi sur Yahoo en 2003. Le paysage numérique bouge vite et la diversification reste une règle de survie pour les marques.

4. Un environnement de diffusion de plus en plus risqué

Depuis quelques mois, la modération des contenus sur Meta se dégrade. Des propos sexistes, homophobes, complotistes refont surface. Des contenus toxiques cohabitent avec des messages de marques.

Pour un annonceur, l’environnement de diffusion est clé. Meta ne peut plus aujourd’hui garantir un cadre sûr. L’IA peut bien être brillante, elle n’a pas de boussole éthique.

5. Le “full bas de funnel” est une stratégie court-termiste

Réduire la communication à la conversion immédiate, c’est oublier la construction de marque. L’obsession du ROI court-termiste crée des marques faibles, sans identité et donc oubliables aussi vite qu’elles sont arrivées.

Rappelons tout de même qu’aucune marque à forte notoriété ne s’est construite qu’avec du digital uniquement. Le digital a parfois du mal avec le haut de funnel or, les marques fortes performent mieux, même à performance égale, parce qu’elles suscitent la préférence, la confiance, la récurrence.

L’IA de Meta ne comprend pas le long terme. Nous, si.

6. L’uniformisation menace l’efficacité média

Si tout le monde utilise la même IA avec les mêmes datas, on aboutira à des plans média standardisés, identiques, sans originalité. Plus personne n’émergera, ou plus exactement c’est l’annonceur qui parle le plus fort qui émergera.

L’agence, elle, sait construire des stratégies différenciantes, des arbitrages inattendus, des ruptures créatives. C’est là que la valeur naît.

Ma conclusion

Ce n’est pas l’IA qui tuera les agences. Ce sont les agences qui intégreront l’IA intelligemment, sans renier leur rôle : être stratèges, indépendantes, créatives, efficaces.

Je comprends pourquoi Mark Zuckerberg essaie de renouer avec les grandes marques, alors que deux de ses vaches à lait, Temu et Shein, ont considérablement réduit la voilure, occasionnant un manque à gagner de près de 7 milliards de dollars pour son groupe selon l’institut de recherche Moffett Natanson.

Mais si Meta peut automatiser ses campagnes, il ne remplacera pas la vision humaine. Pas plus qu’il ne remplacera le conseil. Et certainement pas la confiance.