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Le GEO, nouvel or noir des médias ? Prisma Media et Reworld Media dégainent les premières offres

“Beaucoup de médias vont devoir passer d’une logique de carrefour d’audience à celle d’une base de données dans laquelle les IA viendront régulièrement puiser.” En une phrase, Jérémy Parola, directeur des activités digitales de Reworld Media, résume le défi majeur qui s’impose désormais aux éditeurs : repenser leur modèle économique à l’ère de l’intelligence artificielle.

Des IA qui, à terme, risquent de cannibaliser une partie de leurs audiences, les internautes consultant de moins en moins directement les sites et, par ricochet, d’affaiblir leur principale source de revenus : la publicité.

Si la menace est réelle, mais pas pour tout de suite, les opportunités le sont tout autant. Dès aujourd’hui… Il s’agit d’aider les marques à se tailler une place de choix dans les réponses que formulent les agents conversationnels à leurs utilisateurs. Une pratique désormais désignée sous l’acronyme GEO, pour Generative Engine Optimization.

L’enjeu est bien plus crucial que ne le laisse penser le faible poids actuel des LLM dans le trafic des sites médias. Chez Reworld Media, seules 50 000 sessions mensuelles proviennent de ChatGPT, sur un total de 300 millions. Mais cette donnée masque la véritable influence de ces modèles : une large part de leurs utilisateurs rebondit ensuite sur Google, guidés par les réponses générées par ces IA.

“L’enjeu pour les marques n’est plus seulement d’apparaître en première page de Google, mais d’être cité, et de l’être positivement, par une IA. Un défi que des médias tels que le nôtre peuvent les aider à relever”, analyse Bastien Deleau, directeur exécutif adjoint digital de Prisma Media.

C’est dans ce contexte que Prisma Media et Reworld Media ont chacun décidé de lancer de nouvelles offres commerciales intégrant une dimension GEO, structurées autour de trois piliers :

1° une phase d’audit, pour identifier le positionnement de la marque partenaire (nombre de citations, prompts concernés, tonalité associée)

 2° une phase de co-création, pour publier des contenus,  avec l’aide de l’IA évdeimment, sur les marques médias disposant de la plus forte autorité

3° une phase de bilan, avant/après, pour évaluer l’efficacité du dispositif

Une étape sur laquelle Prisma Media, associé à la plateforme Minddex dans le cadre du lancement de cette offre (là où Reworld Media s’appuie sur un outil propriétaire en bêta depuis mars dernier), compte tout particulièrement mettre l’accent.

“Trente à soixante jours après la campagne, nous mesurons si la marque remonte mieux, plus souvent et de manière qualitative dans les modèles”, explique Bastien Deleau, que des tests menés au cours des dernières semaines ont rendu plutôt confiant quant à l’efficacité de ce type de dispositif. 

Minddex a analysé la performance d’une dizaine de campagnes de contenus sponsorisés réalisées au cours des trois derniers mois. “Dans 83% des cas, un titre de Prisma Media figurait parmi les quinze sources les plus citées en réponse à des prompts liés aux problématiques de ces campagnes”, chiffre Thibaut Fitoussi, cofondateur de Minddex.

Même constat du côté de Reworld Media, qui a fait tourner son outil sur l’ensemble de ses campagnes (OPS, display, prix, etc.) depuis mars dernier, et dont les marques médias sont citées dans 80% des prompts liés aux thématiques mises en avant avec, précise Jérémy Parola, “une surpondération de certains formats vintages, comme les forums, FAQ ou tests produits, qui rappellent l’internet d’il y a vingt ans.”

Si l’impact est tangible, pas question, pour autant, d’en faire un critère de rémunération, même chez un habitué des dispositifs vendus à la performance, comme l’est Reworld Media. “C’est trop tôt, estime Jérémy Parola. D’autant que des dispositifs de ce genre doivent se construire sur trois à sept mois, avec de la répétition et de la preuve, pour avoir un impact sur des LLM qui s’appuient autant sur leurs données d’entraînement que sur leur mémoire à court terme.” “Le sujet est encore trop frais”, abonde Bastien Deleau.

Le sujet est frais… mais les leads sont, eux, très chauds, surtout depuis début septembre à en croire le duo. “Il y a vraiment eu un avant/après l’été, constate Jérémy Parola. A croire que certains dirigeants ont été influencés par les vacances passées avec leurs ados !”

Même constat du côté de Prisma Media, qui commercialise son offre depuis une quinzaine de jours et dit avoir déjà reçu une dizaine de briefs, essentiellement de la part du Big Five. “Les premières campagnes devraient être diffusées d’ici quinze jours”, précise Bastien Deleau.

Prisma Media comme Reworld Media comptent désormais intégrer leur offre GEO dans des dispositifs plus globaux, combinant content-to-commerce, social publishing et OPS. Un moyen, explique Bastien Deleau, d’aller là où sont les budgets. “Les cellules SEO et innovation trouvent ça génial… mais n’ont pas de budget IA. Donc on va piocher du côté des enveloppes content-to-commerce.”

Pas une surprise dans la mesure où le GEO est, finalement, une extension naturelle de ce type de dispositifs. Avec, toutefois, quelques spécificités à en croire Bastien Deleau, puisque la profondeur du message et la force des marques jouent un rôle clé dans l’efficacité des dispositifs GEO. “Bien sûr qu’on veut aider les marques à être plus citées, mais on veut surtout le faire pour celles qui en ont la légitimité et la capacité.” 

“On restera caution aux yeux de l’IA tant que nos contenus auront de la valeur. Faire n’importe quoi, c’est risquer de tuer le business dans l’œuf”, poursuit Bastien Deleau. Raison pour laquelle tous les dispositifs de ce type seront clairement identifiés comme “publicitaires” pour le LLM comme pour l’utilisateur, qui sera également (ne l’oublions pas) exposé à ces contenus.

Chez Reworld Media aussi, on se fixe des limites claires : “On respecte simplement les guidelines globales. Pas question de faire du Shein, du Temu ou de la crypto”, illustre Jérémy Parola.

Reste une question : est-ce que les contenus labellisés comme publicitaires ne risquent pas d’être sous-pondérés par les IA ? “C’est un risque, effectivement, mais les tests des dernières semaines montrent que ce n’est pas le cas : nos dispositifs de marque remontent aussi bien que les contenus purement éditoriaux”, observe Bastien Deleau.

Pour le dirigeant, il ne s’agit au fond que d’une nouvelle évolution du marché publicitaire digital. Une évolution qui pourrait, à terme, s’inviter directement au sein des LLM. Chez Reworld Media, on propose déjà des assistants verticalisés (sur la beauté ou la cuisine) disponibles dans le store de ChatGPT. “C’est un peu comme à l’époque des assistants vocaux, avec des assistants sponsorisés qui peuvent orienter, de préférence, vers la gamme de la marque partenaire”, illustre Jérémy Parola.

Vous l’aurez compris, le duo a décidé de prendre les devants d’un paradigme au sein duquel on lui promet parfois l’enfer. “Hier, on ne jurait que par la visibilité, aujourd’hui par l’attention, et demain sans doute par le nombre de citations”, estime Bastien Deleau. Et cela pourrait, à en croire Jérémy Parola, devenir un business florissant. 

“Si ce genre d’offres permet aux médias d’aller piocher dans les budgets SEA, brand content et SEO, le marché pourrait facilement atteindre le milliard d’euros en France d’ici cinq ans.”

À condition, toutefois, que les médias réchauffent leurs relations avec les LLM, refroidies à mesure que se multipliaient les procès pour non-respect du droit d’auteur. “C’est un sujet”, reconnaît Jérémy Parola qui se réjouit, en tout cas que Prisma Media et sans doute d’autres, par la suite, se positionnent sur le GEO. “Plus on sera nombreux, plus il sera facile d’évangéliser !”