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Les bons réflexes pour transformer vos outils de mesure en (vrais) outils de décision

Udecametrics, fruit de la collaboration entre la commission "Metrics & Analytics" de l'Udecam et Open Garden, se positionne comme un rendez-vous essentiel pour partager des analyses pédagogiques sur l'écosystème média. Notre objectif est d'apporter un éclairage sur les sujets majeurs et de fournir un discours clair et didactique.

En septembre, nous avons abordé l'arbitrage entre budgets de marque et de performance, soulignant comment le brand marketing peut devenir un levier de croissance, même face à un CFO. 

En période d'incertitude, cette question est cruciale et met en lumière la nécessité d'outils de mesure adéquats. Démontrer l'avantage stratégique d'investir dans la marque est fondamental. Nous avions déjà exploré diverses méthodologies comme le brand tracking, les post-tests, les MMM et les modèles imbriqués.

Aujourd'hui, nous souhaitons partager le point de vue de l'agence face à la prolifération de solutions reliant investissements média et performance commerciale. L'enjeu est de définir la proposition la plus opérationnelle pour optimiser significativement les impacts média. 

Au premier semestre 2025, le marché publicitaire a enregistré une croissance nette de +4,3% par rapport au S1 2024, tirée par le digital (+10,8%). Cette dynamique, alimentée par l'essor de l'e-commerce, accentue l'omnicanalité des parcours consommateurs. Les annonceurs doivent soutenir leur activité dans un environnement économique incertain. 

Cependant, le marché publicitaire évolue plus vite que les propositions de mesures, qui peinent souvent à offrir une approche holistique des activations de plus en plus sophistiquées et digitalisées.

1° Comprendre les limites de chaque outil

Le paysage de la mesure de performance média et marketing est caractérisé par une multitude d'outils et de méthodologies, reflétant la complexité croissante des parcours clients et des écosystèmes digitaux. Des approches classiques (panels consommateurs, post-tests de campagne) aux solutions d'attribution multi-touch, chaque méthode offre une perspective unique.

La mesure de l'efficacité média est devenue un sujet stratégique et complexe. Derrière les techniques mathématiques (attribution, contribution, modèles économétriques, tests incrémentaux), une réalité simple demeure : aucun outil ne détient la vérité absolue. 

Prenons le Marketing Mix Modeling (MMM), dont la version modernisée revient en force via notamment des propositions open source comme Meridian (Google) ou Robyn (Meta). 

Meridian, basé sur des méthodes bayésiennes, intègre diverses données mais requiert des données historiques propres et des compétences analytiques. Robyn offre une meilleure lecture de la saisonnalité et des effets d'adstock.

Tous deux quantifient la contribution de chaque levier marketing (online et offline) aux ventes. Ils répondent, ce faisant, à un besoin de mesure globale et cross-canal, notamment face aux défis du tracking.

Leurs limites sont néanmoins connues : exhaustifs mais peu granulaires, fiables mais peu actionnables.

A l’inverse, les systèmes d’attribution sont au plus proche du champ d’action, bien compris par les équipes opérationnelles, mais leur fiabilité est de plus en plus challengée par la raréfaction des signaux de conversions (disparition des cookies tiers, baisse du consentement au tracking depuis l’entrée en vigueur du RGPD…)

Des outils plus spécifiques, tels que les tests A/B pour l'optimisation créative, Brand Lift Studies sur les plateformes digitales, Customer Journey Analytics, n’ont pas ce problème.

L'intelligence artificielle et le machine learning apportent des capacités "magiques" à déceler des corrélations complexes et prédire des comportements. Même si, dans le cadre d’un AB test, le périmètre de mesure est archi restreint.

2° Définir ses besoins… et intégrer ces mesures dans le quotidien des équipes

Ce vaste éventail peut devenir un labyrinthe. Le défi est de comprendre les spécificités et limites de chaque outil, et de choisir les plus pertinents pour des objectifs business précis, sans se laisser aveugler par la promesse d'une solution universelle.

La communication, les médias et la publicité sont des expertises difficiles à condenser dans un simple tableau de bord. L'enjeu n'est pas de choisir "le" modèle idéal, mais de comprendre les apports et limites de chacun pour les intégrer de manière cohérente. L'étape cruciale est de définir les besoins et d'intégrer ces mesures dans le quotidien des équipes (annonceur, agence, mesureur). 

L'arsenal technologique et méthodologique pour mesurer la performance s'est considérablement enrichi (panels boostés, données synthétiques, régression, approches bayésiennes, réseaux de neurones). Cependant, il est impératif d'aborder ces outils avec un principe de précaution fondamental. 

Nous appliquons des sciences exactes, comme les statistiques, à la complexité des comportements humains. Ces outils, aussi sophistiqués soient-ils, ne sont que des approximations, des modèles visant à observer et prédire des tendances de consommation. Ils ne peuvent capturer l'intégralité des motivations et interactions sous-jacentes aux décisions d'achat.

Le déploiement d'un outil de mesure n'est jamais une fin en soi. Son objectif doit être clairement défini en amont : quels efforts d'optimisation servira-t-il ? Quelles questions stratégiques éclairera-t-il ? Quelles hypothèses infirmera ou confirmera-t-il ? Et surtout, qui sont les publics cibles au sein de l'organisation (coordination média, direction marketing, comex, procurement, etc.) qui utiliseront ces insights pour prendre des décisions concrètes ? 

Sans cette réflexion préalable et cette rigueur dans la définition des besoins, le risque est grand de collecter des données sans générer de valeur stratégique tangible.

Il est, dans tous les cas, crucial de distinguer une mesure "bilantielle" d'un outil de pilotage intégré aux décisions quotidiennes. Car ce genre d’outil doit s'intégrer dans un pilotage collaboratif avec l'agence, transformant l'outil d'observation en un véritable instrument de décision. 

Cette relation tripartite est essentielle pour maximiser l'impact business des marques. Notre objectif : passer de la foi aveugle à une culture de la preuve éclairée.

3° S’assurer de la qualité des données qui alimenteront les modèles

La robustesse de toute mesure de performance, des post-tests aux modélisations complexes comme le Marketing Mix Modeling (MMM), repose intrinsèquement sur la qualité et la pertinence des données d'entrée. Pour les post-tests, il est essentiel de relier l'impact brut à un niveau de distribution de contact précis, en modélisant couverture et fréquence estimées. Cette granularité oriente les stratégies média vers les combinaisons optimales.

Dans un modèle, les données à intégrer sont cruciales et ne peuvent se limiter aux aspects financiers. Elles doivent être enrichies de transformations pour prendre en compte la qualité des contacts, lisser la variabilité des diffusions et refléter la nature hétérogène des canaux. 

Par exemple, comment intégrer des données TV linéaire, BVOD, SVOD et VOL, qui diffèrent par leur nature et leur variabilité de diffusion ? Comparer les ROI et contributions de chaque format vidéo isolément a-t-il un sens, alors que le planning en agence vise à optimiser la couverture globale et répond à des engagements clients ? Ne vaut-il pas mieux mesurer le ROI et la contribution d'une stratégie audiovisuelle globale pour appréhender l'effet combiné ?

En définitive, ce n'est pas tant le niveau de ROI ou de contribution des modèles qui importe, mais la capacité à comprendre pourquoi et comment il varie sur une période d'observation. Il s'agit de décrypter l'impact du contexte sectoriel, du cycle de vie du produit, de la saisonnalité des coûts média et des ventes sur ces indicateurs. Ces chiffres ne sont pas des réponses définitives, mais des points de départ pour des interrogations stratégiques approfondies.

4° S’appuyer sur son agence média : partenaire au cœur de la performance

Dans ce paysage complexe de la mesure de performance, l'agence média se positionne comme un partenaire stratégique indispensable. Maîtrisant et développant des outils d'analyse sophistiqués pour ses clients, elle est souvent sollicitée pour interpréter des données de diverses sources et méthodologies. 

Si ces analyses externes apportent des éclairages précieux, il est crucial que les conclusions dépassent le simple constat de ROI et de contribution pour aboutir à des recommandations opérationnelles concrètes et pertinentes.

C'est pourquoi, lorsque des projets de mesure sont confiés à des prestataires externes, l'intégration active des spécialistes des agences média est fondamentale. Leur expertise garantit la validité des prérequis méthodologiques et assure que les résultats des mesures seront pleinement applicables opérationnellement, notamment pour optimiser les stratégies d'investissement média. 

De plus, l'agence média est particulièrement bien placée pour maîtriser la nature et la qualité des données en entrée des modèles – une condition sine qua non pour la fiabilité des analyses – renforçant la nécessité de son implication dès l'amont de ces projets.

Forte de sa connaissance approfondie des marchés, des canaux et des objectifs clients, l'agence est un acteur clé pour accompagner les marques dans la mise en place de ces projets. D'autant que ces outils de mesure représentent un investissement significatif. 

Il est illusoire de vouloir tout déployer simultanément ; une approche stratégique est nécessaire pour s'assurer que chaque outil éclaire un besoin précis au moment opportun de la prise de décision. 

C'est précisément là que l'agence média apporte une valeur ajoutée essentielle : en construisant des feuilles de route évolutives, elle contribue à la mise en place des bons outils de mesure au bon moment, accompagnant ainsi le développement commercial des marques avec une vision claire et mesurable.